Retour en images sur la conférence de Michel BRUNET, Paléoanthropologue, au lycée Hoche le 8 avril 2015

 

 
 

 

 

Michel BRUNET : ORIGINE et HISTOIRE de la FAMILLE HUMAINE – Nous sommes tous des africains

Notre conférencier Michel BRUNET, Professeur émérite au Collège de France, titulaire de la chaire de Paléontologie humaine, ancien de Hoche (1958), compte 52 années d’enseignement supérieur en paléontologie humaine, et a banni de son vocabulaire le mot « retraite » ; il continue à organiser et mener des recherches hors de France, et à donner des conférences à des publics de tous âges. Infatigable, passionné et passionnant, il nous a présenté l’objet et les conclusions de ses recherches, ses méthodes, et les perspectives qu’il en dégage pour notre avenir, en les illustrant sur écran par de nombreux schémas et photos très réussis.

1.Les recherches et leur contextes aventureux

1.1 Les recherches
La recherche des origines de l’homme fait apparaître des événements spectaculaires qui dépassent notre imagination. Ainsi, Le SE asiatique, le Golfe persique, l’Afrique et l’Amérique du Sud formait, il y a 40 millions d’années, une forêt tropicale peuplée il y a 40 Ma des premiers singes anthropoïdes (singes sans queues, précurseurs de l’homme) avec séparation ultérieure en deux groupes : l’un dans l’Ancien monde, l’autre dans le Nouveau monde. Les expéditions de M. Brunet recherchent … et trouvent des restes de ces petits singes de 2 à 5 kg, aux dents millimétriques.
La notion d’Homme fossile est très récente … après le début des premières découvertes en Belgique, vers 1825, seules celles des néandertaliens ont été reconnues autour de 1850 (vivant de -30 à -80 milliers d’années), puis les découvertes se sont succédées …
Sur le Continent Africain on est remonté assez récemment à des millions d’années (Ma) avec :

  • l’enfant de Taung (Afrique du Sud, retrouvé en 1925), vieux de 2.5 Ma ;
  • la célèbre LUCY datée de 3.2 Ma (en Ethiopie, 1974) ;
  • le crâne de ToumaÏ qui a 7 Ma (Tchad, Erg du Djourab, en 2001).

C’est son équipe qui a ensuite reconstitué le crâne de ToumaÏ telle qu’il était il y a 7 M d’années. Le résultat est spectaculaire : par l’effet des coupes scanner, puis des reconstructions, y compris du cerveau, et les ajouts de la peau et de cheveux naturels, on se trouve face à face avec la plus ancienne face humaine préhistorique comme on la croisait en pleine nature il y a 7 M d’années.

1.2 Le contexte : l’environnement hostile, l’aventure
M. Brunet et son équipe ont été très actifs notamment au Tchad, en Afghanistan, Lybie, Egypte, Cameroun et plus récemment en Antarctique avec l’aide de la logistique de la Marine chilienne : ils n’y ont pas trouvé les dents millimétriques recherchées, mais des feuilles de la forêt tropicale d’il y a 40 millions d’années.
Ces expéditions de recherche sont de véritables aventures. Tout d’abord, elles requièrent d’une part des actions diplomatiques avec les états concernés, pour connaitre et évaluer la situation locale, souvent marquée par des conflits armés (Afghanistan) ou des risques d’enlèvement (Boko Aram), pour obtenir les autorisations, et d’autre part des soutiens (la logistique de la Marine chilienne). Les effets des découvertes peuvent être eux aussi diplomatiques et importants : le pays de la découverte peut atteindre une notoriété inattendue car il devient une partie du territoire du berceau de l’humanité.

Ensuite, sur le terrain, elles sont souvent éprouvantes à cause des conditions, et d’abord les températures : en Antarctique, on vit assez souvent à -30 °C sous l’effet du vent, et on subit 40° voire plus au Tchad où la survie dépend des trois ressources, véhicules 4 x 4, gazole et eau ; par ailleurs, on affronte des tempêtes australes ; et dans le désert, on vit comme les pionniers du far West, au milieu du cercle protecteur formé par les véhicules ! Michel Brunet nous a fait percevoir combien il aime le désert (probablement comme Lawrence ou Théodore Monod, avons-nous pensé … ?).

Le travail de recherche peut être terriblement long : une fois la cible (zone probablement riche en fossiles) déterminée, on doit tout passer au peigne fin (en effet, on balaye – au sens propre – et on tamise le désert ….., ce qui a bien fait rire un détachement de la Légion étrangère installé à côté des anthropologues! Dans un cas, il lui a fallu 25 années de recherche pour trouver la cible recherchée, et dans un autre 17 ans pour retrouver la seconde moitié d’une mâchoire.

2.Méthodes et enseignements professionnels

Il nous livre tout ce que cette longue vie de chercheurs lui a enseigné.

La rigueur scientifique et l’humilité du chercheur: trop de chercheurs ont exprimé devant lui des affirmations sans preuves, telles que « vous ne trouverez rien dans cette zone « alors qu’elle n’avait pas été fouillée, et les faits ont donné ultérieurement tort à ces donneurs de leçons. D’autre part, le nombre et l’ampleur des sites qui sont encore à découvrir, puis à fouiller, induisent le constat que bien souvent il est impossible de se prononcer, car « on ne sait pas «.

La nécessaire conviction préalable : « il faut y croire pour y aller « ; après tout ce qu’il nous a montré de ses chantiers aux délais et difficultés nombreuses et variées, nous comprenons vite que c’est une condition qui s’impose très naturellement … et la persévérance : là aussi, tous les participants à la conférence ont été vite convaincus de cette exigence … mais ont aussi compris que cela vaut pour les autres sciences et beaucoup d’autres activités professionnelles.

3.Conclusions et perspectives

En dépassant la restitution de ses travaux, M. Brunet a tout naturellement évoqué l’avenir de l’humanité.
Il ne conteste pas le réchauffement planétaire, et rappelle la croissance de la population mondiale :

  • en l’an – 10 000, nous étions environ 25 M (millions),
  • en l’an 1, le monde avait 250 M, puis est passé à
  • en 1600, 550 M ; en 1800 : 1 Md (milliard) ;
  • en 1960 : 3 Md ; … et nous serons en 2050 quelque 9 Md.

Dans ce contexte, c’est probablement la pénurie mondiale d’eau qui sera la plus cruelle.

L’histoire de notre monde nous montre à la fois l’émergence de la vie et la survenance périodique d’extinctions d’espèces, dont la plus grande est survenue il y a -265 Ma, et d’autres à -65 Ma, -365 Ma, et -436 Ma ; elles résultent de causes multiples dont la liste ne recueille pas l’unanimité des scientifiques : volcanisme ; gaz à effet de serre, surtout le méthane ; collisions de la Terre avec des astéroïdes. Nous serions en route vers la sixième grande extinction, qui pour la première fois aurait pour cause l’action d’une espèce, l’homme.

Michel Brunet insiste sur sa conviction : c’est l’éducation, qui permettra à l’humanité d’y faire face, en apportant les connaissances, les références et les méthodes nécessaires, par exemple pour optimiser le cycle de l’eau. Elle est indispensable pour que nous continuions à connaître notre passé, et à pouvoir déceler les grands enjeux et les grandes lignes de notre avenir afin d’orienter notre course. Il continue donc inlassablement ses recherches et ses conférences sur l’anthropologie.

L’assistance a chaleureusement applaudi le conférencier pour lui exprimer ses vifs remerciements, et une séquence de questions – réponses a permis de satisfaire les curiosités résiduelles !

Vincent BOURGERIE, administrateur de l’Association des Anciens de Hoche

 
 
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