Histoire du lieu

Histoire du lycée Hoche

Marie Leszczynska  et le Dauphin

Marie Leszczynska
et le Dauphin

La présente page résume les éléments détaillés dans l’ouvrage Le lycée Hoche de Versailles, deux cents ans d’histoire de Marie-Louise Mercier-Jouve.

Marie Leszczynska (ou Leczinska) est la fille de Stanislas 1er Leszczynski, roi de Pologne détrôné qui avait reçu en compensation le duché de Lorraine. Elle est aussi l’épouse de Louis XV depuis 1725. La reine, femme discrète, pieuse et cultivée, aimant les arts et la conversation des brillants esprits de l’époque, hérite de son père en 1766 et décide de faire édifier une maison d’éducation pour les filles d’officiers attachés à son service et des serviteurs qui travaillaient pour la Cour.

Pour mener à bien son projet la reine obtient en février 1767 de son époux le roi Louis XV onze arpents de l’ancien domaine de Madame de Montespan à Clagny, en bordure de l’avenue de Saint-Cloud.

Par fidélité à l’aumônier de son père, la reine choisit pour diriger ce couvent la communauté Notre-Dame de l’ordre des Chanoinesses régulières de Saint-Augustin, congrégation particulière d’Ursulines, fondée par Saint Pierre Fourier en Lorraine au début du XVIIème siècle et qui possédait déjà un couvent à Compiègne où la reine aimait à se rendre.

La reine fait appel à l’architecte Richard Mique déjà au service de son père en Lorraine. Mique, comme nombre d’architectes de cette époque, est influencé par la pensée d’Andrea Palladio (1508-1580) qui marqua profondément l’architecture de la Renaissance italienne. Il exerce à l’époque ses talents à Nancy et Lunéville où il utilise l’imitation du style antique qui commence à être de mode. Il deviendra par la suite le principal maître d’œuvre des travaux de Versailles à la fin du XVIIIème siècle.

Richard Mique se précipite à Versailles. La reine lui fait attribuer des appartements dans le Grand Commun du Château et lui installe des bureaux dans le château de Clagny. Celui-ci ne sera démoli qu’à partir d’avril 1769, et ses pierres serviront à la construction des maisons de l’avenue de Saint-Cloud.

La Villa Rontonda

la Rotonda de Vicence

Sur demande de la reine, Richard Mique conçoit plusieurs projets dont un avec une chapelle basilicale qu’elle approuve.

L’organisation des bâtiments est celle d’une villa palladienne. L’actuelle chapelle tiendrait la place et aurait la forme de la Rotonda de Vicence (1566-1567).

Les travaux commencent en 1767 et l’on utilise les pierres d’un projet inachevé d’hôpital commandé par le Dauphin et abandonné après sa mort en 1765, des pierres du château de la favorite royale et des carrières d’Arcueil et de St-Leu.

A la mort de la Reine, le 24 juin 1768, le projet n’est pas achevé.

Ses filles poursuivent son œuvre, et c’est plus particulièrement la ténacité de sa cinquième fille, Madame Adélaïde (1732-1800) qui permettra à Richard Mique de mener à terme les travaux. Les bâtiments conventuels sont achevés dès 1772, la chapelle seulement en 1774.

Comme prévu, la chapelle présente l’aspect d’un temple antique avec des colonnes cannelées et ornées de chapiteaux ioniques. Son fronton est illustré de représentations allégoriques, respectivement la Foi, l’Espérance et la Charité.

La chapelle de Hoche

La chapelle du lycée Hoche

Sa façade comporte deux niches restées vides en 1792 et prévues pour respectivement recevoir une représentation de la Vierge et une de la « Sagesse divine » (Sophie).

Elles accueillirent au XIXème siècle deux statues : saint Jean Chrysostome et saint Augustin, sculptées par Gourdel.

Les médaillons surplombants étaient destinés aux armoiries de France et de Pologne. Sous le Premier Empire, on y plaça un N relevé d’or sur fond bleu, remplacé à la Restauration par deux L entrelacés, puis finalement des bas-reliefs de Bossuet et Fénelon.

La porte de la chapelle est également surplombée d’un bas-relief représentant la Reine Marie Leszczynska entourée de ses filles. Sur sa partie droite, on distingue des religieuses présentant des jeunes élèves à la Reine. A l’extrême-droite, une console et un vase font référence aux découvertes faites à Pompéi et à Herculanum. L’arrière plan de ce bas-relief, traité à l’antique, représente le couvent. A l’intérieur du bâtiment, une frise de bas-reliefs représente la vie de la Vierge. L’ensemble des sculptures fut réalisé de 1771 à 1774 par Joseph Deschamps, supervisé par Bocciardi, et collaborateur de Richard Mique pour la partie sculptée.

Gabriel Briard et surtout Lagrenée le Jeune peignent la magnifique coupole intérieure. Toute cette décoration n’est achevée que vers 1779.

L’architecture générale du couvent est parfaitement symétrique : les bâtiments des pensionnaires et des religieuses s’organisent autour de deux cloîtres séparés par un corps central plus élevé, occupé par un logis de deux étages face au domaine de Clagny, situé hors de la clôture et précédé par un jardin intérieur. Les plans peuvent en être consultés à partir des liens ci-après.

Les quartiers gauches du couvent étaient réservés aux pensionnaires, ceux de droite aux religieuses. Ils étaient séparés par des barrières de bois à claire-voie. les différentes pièces étaient affectées aux activités communes.

On accédait au couvent par une longue galerie qui le relie au parloir.

Les deux ailes du parloir communiquent par un pan à 135 degrés qui restitue un effet de perspective. L’agencement des façades dégage trois plans successifs : les deux façades des pavillons et le bâtiment du couvent.

Dans chaque bâtisse, de grandes arcades s’ouvraient sur des jardins d’agrément, des potagers, cinq pièces d’eau, et le parc de Clagny, jardin à la française, contribuant également à la luminosité de l’édifice. Les inventaires de l’époque évoquent 1200 arbres fruitiers, 600 ceps de vigne, 360 tilleuls, des gazons et des fleurs.

Louis XV accompagné de Mesdames Adélaïde, Victoire, Sophie et du comte de Noailles, gouverneur de Versailles, inaugure le couvent sous la direction de Richard Mique le 29 septembre 1772.

Le 30 septembre, à 21 heures, les religieuses arrivent au couvent où Richard Mique et son épouse les accueillent par un dîner servi par les officiers de la bouche du Roi.

La première messe est célébrée le 1er octobre, après bénédiction des lieux. La clôture du couvent est reportée au lendemain. En effet Mesdames souhaitent recevoir les religieuses au château où elles sont conduites en carrosses à huit chevaux. La Dauphine Marie-Antoinette, le comte et la comtesse de Provence les reçoivent.

La procédure de clôture se déroule donc le vendredi 2 octobre.

Louis XV met fin aux cérémonies protocolaires en assistant le 4 octobre dans le chœur des pensionnaires au salut et à la bénédiction du Saint-Sacrement.

La rentrée des premières pensionnaires, jeunes filles d’officiers servant la famille royale, s’effectue le 1er janvier 1773.

Le couvent héberge en permanence 80 pensionnaires. 383 pensionnaires passeront par l’institution de 1772 à 1789. La qualité de l’enseignement dispensé en fait un succès considérable pour l’époque. Les religieuses devront cependant constamment résister pour conserver la volonté de la fondatrice et accueilleront peu de jeunes filles de la grande noblesse.

Le succès de l’établissement prend fin à la Révolution avec le départ de Versailles de la famille royale en octobre 1789.

Un inventaire des biens est ordonné en 1790, après la mise à disposition de la Nation des biens du clergé.

La congrégation abandonnent définitivement le couvent en 1792.

En 1793 la chapelle est occupée par la 2ème section versaillaise de la Société des Droits de l’Homme.

En 1794 elle devient hôpital militaire.

De 1795 à 1800 l’établissement reste inoccupé et sert d’entrepôt à grains et à fourrages.

En 1800 elle redevient un hôpital militaire succursale des Invalides.

En 1801, après la fermeture de l’Ecole Centrale du département, la ville de Versailles souhaite la création d’un lycée pour offrir des facilités scolaires aux riches familles étrangères résidentes.

Le 22 novembre 1802 voit la création de 30 lycées en France. Par décret consulaire du 1er Vendémiaire an XII (24 septembre 1803) l’ancien couvent devient un lycée. Le 23 octobre 1804 le préfet de Versailles obtient l’ouverture du lycée. Son premier proviseur, Dieudonné Thiébaut, est chargé de remettre les bâtiments dévastés en état. Trois années sont nécessaires pour mener à bien cette tâche.

Par décret impérial de Posen (aujourd’hui Poznan, en Pologne) du 7 mai 1806, le lycée devient lycée impérial. Le 15 décembre 1806 sont nommés les 13 premiers professeurs et les 150 premiers élèves. En 1809, par le décret impérial de Schönbrunn (Vienne), le lycée de Versailles devient l’un des huit lycées de première classe de l’Empire. Cette reconnaissance témoigne des premiers succès scolaires des élèves, deux d’entre eux étant entrés cette année-là à Polytechnique.

Le lycée traverse le siècle, devient Collège Royal de première classe en 1816, compte plus de 500 élèves sous le provisorat de Théry, et est intégré en 1819 aux Collèges Royaux de Paris qui développent des classes préparatoires aux grandes écoles .

Lazare Hoche

Lazare Hoche

Le lycée sera successivement lycée National de 1848 à 1853, lycée Impérial de 1853 à 1870, lycée National de nouveau de 1870 à 1888 pour devenir lycée Hoche en 1888, en l’honneur du général républicain, né à Versailles en 1768 et mort le 19 septembre 1797 à Wetzar (Prusse), à l’âge de 29 ans, d’une tuberculose.

 Ces changements de statuts et d’appellations témoignent des bouleversements politiques du siècle et influent sur la vie du lycée, provoquant des troubles parfois importants : révoltes des élèves pendant la Restauration, affrontements entre élèves durant la Monarchie de Juillet et la Seconde République, transformation en hôpital allemand pendant la guerre de 1870.

Le développement de la fréquentation scolaire entraîne la construction de nouveaux bâtiments, architecturalement disparates, aux dépens du potager du lycée: l’aile Napoléon (1856-1858), puis le Petit lycée à l’est (1862-1864). Le Petit lycée aurait été destiné à recevoir le Prince impérial.

Ces évolutions ne modifient pas la vie quotidienne des élèves qui reste empreinte de la discipline militaire des lycées napoléoniens (uniformes, mouvements au tambour, cachots), et particulièrement sévère pour les internes. La dureté de cette vie est tempérée, de temps à autre, par de sérieux chahuts, de grandioses distributions solennelles de prix et les banquets de la Saint Charlemagne.

La croissance des effectifs du lycée s’accélère encore au 20ème siècle avec la scolarisation d’élèves s’échelonnant de la 11ème aux classes préparatoires aux grandes écoles.

Le lycée Hoche reste au 20ème siècle un acteur de l’histoire de France : la Première Guerre Mondiale le transforme en hôpital et nombre d’anciens élèves, professeurs et agents se sont sacrifiés dans les combats (cet ouvrage traite spécifiquement de cette période) . La Seconde Guerre Mondiale le transforme successivement en centre d’accueil, caserne, chapelle ardente au gré des bouleversements que subit le ville : exode, occupation, bombardements meurtriers. Touché par les bombardements de 1944, le lycée effectue une rentrée dans des bâtiments pillés.

De 1947 à 1954 est construit le bâtiment des sciences à l’ouest. Les salles sont équipés en vue de travaux pratiques de chimie et de physique.

En 1957 commence la construction du premier bâtiment de l’internat, à l’est. Il est ouvert aux élèves le 1er octobre 1959. Le Petit lycée est détruit en 1960, et deux nouvelles ailes du bâtiment de l’internat sont construites. Elles sont ouvertes le 1er octobre 1962.

Ces nouvelles constructions respectent  le style de l’ancien couvent, lui-même en partie restauré, restituant leur beauté initiale aux galeries du cloître. Ces dernières avaient été, avec l’ensemble du Couvent de la Reine, classées monument historique en 1926.

Au fil du temps et des réformes, le primaire disparaît, le collège et le lycée se séparent administrativement. La vie des élèves n’échappe pas à ces mutations et voit un assouplissement progressif du règlement intérieur, un plus grand confort de la vie quotidienne. Comme ailleurs, le lycée est le siège de tensions parfois vives : mai 1968, contestations de réformes ministérielles, etc…

La mixité apparaît dès le collège au cours des années 1970, et le lycée se spécialise dans les enseignements scientifiques et commerciaux, les sections littéraires devenant l’apanage du lycée La Bruyère.

Le lycée Hoche est entré en 2003 dans son troisième siècle d’existence et reste fidèle à ses objectifs initiaux : la réussite et l’épanouissement des élèves. De 2004 à 2010 il a subit d’importants travaux de restauration et de restructuration qui lui permettent de toujours dispenser un enseignement d’excellence. Une fois encore, la chapelle fut le bâtiment le plus long à restaurer. Le 25 novembre 2011, dix ans après sa fermeture en raison des dangers de chute de pierres, elle est à nouveau ouverte à ses usages cultuels et culturels. Une messe de réouverture a lieu le lundi de Pâques 9 avril 2012.

De nombreux détails sur le lycée Hoche sont disponibles dans l’ouvrage publié en 2010, à l’occasion des célébrations du bicentenaire : Le lycée Hoche: 200 ans d’histoire, de Marie-Louise Mercier, professeur honoraire au lycée. Information sur ce livre

 
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